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  Modélisations et simulations spatiales appliquées à l'aménagement et à la géoprospective
 

Modélisation spatio-morphologique de l'urbanisation
du littoral languedocien

Christine Voiron-Canicio
ESPACE - Nice

 

Résumé

La contribution présente un exemple de démarche de modélisation spatiale appliquée à la géoprospective territoriale qui a pour but de modéliser la diffusion future du bâti dans un espace convoité, le sous-ensemble littoral languedocien.

Le modèle est hypothético-déductif, il repose sur l’hypothèse qu’il existe des règles générales de diffusion du bâti, indépendantes des réglementations des documents d’urbanisme, qui rendent compte de la majeure partie du processus de diffusion. La démarche modélisatrice se décompose en trois étapes.

  • La première est destinée à comprendre les modalités de la diffusion du bâti dans la zone littorale languedocienne, afin de déterminer les règles de diffusion qui seront introduites dans le modèle.
  • La deuxième étape est celle de la modélisation spatio-morphologique, dont l'objectif est de simuler la croissance des surfaces bâties dans un espace donné, à partir des noyaux bâtis existant, puis de détecter les lignes directrices de l’urbanisation simulée. La modélisation s’effectue par analyse d’image, en utilisant la morphologie mathématique comme méthodologie.
    Deux processus de diffusion théorique sont successivement testés et validés dans le but d’obtenir la meilleure estimation de la diffusion observée.
  • Le modèle validé est appliqué à l'estimation de l'étalement urbain, à l’horizon 2010. La modélisation, conduite à partir des surfaces bâties de 1990, simule différentes options de croissance future de l’urbanisation dans le champ d’étude.

 

Présentation de la démarche

A. Recherche des modalités de diffusion du bâti entre 1960 et 1990

De manière générale, l’urbanisation progresse selon 3 processus distincts qui conjuguent leurs effets :

  • l’extension des surfaces bâties à partir des points d’ancrage initiaux, avec coalescence des zones bâties les plus proches,
  • l’essaimage du bâti à proximité des noyaux initiaux,
  • l’apparition de bâti dans des zones non encore urbanisées, soit sous forme d’habitat diffus, soit sous forme de lotissements ou d’opérations d’aménagement intégré.

Ces trois modalités de diffusion sont très inégalement représentées au cours des 2 périodes d'étude 1960-1977 et 1977-1990.

 

 Extension en taches d’huile à partir du bâti existant  période 1960-1977  période 1977-1990
 Essaimage à proximité du bâti existant  période 1960-1977  période 1977-1990
 Habitat créé dans des zones non urbanisées  période 1960-1977  période 1977-1990

 

B. Les étapes de la modélisation spatio-morphologique du bâti

La modélisation spatiale de l’urbanisation et la détection des lignes directrices de la diffusion du bâti ne sont réalisées que par traitements d’image à l’aide d’opérateurs de morphologie mathématique.

Les règles de diffusion introduites dans le modèle découlent de l’étude des modalités de diffusion observées entre 1960 et 1990 : diffusion s’effectuant d'une part autour des espaces déjà bâtis et d'autre part, dans des directions privilégiées variant selon les périodes d'étude. Le modèle de base repose sur les règles de base suivantes :

  • la propagation du bâti ne s’effectue qu’à partir des espaces déjà bâtis à une date donnée,
  • la diffusion se produit par la connexion des éléments bâtis existants les plus proches.

 

Première simulation : diffusion uniquement produites par des fermetures géodésiques

La transformation morphologique de la fermeture s’effectue en deux temps. Tout d’abord, les composantes bâties sont dilatées de un pixel puis, l’image résultat est érodée d’une taille équivalente. Cette séquence a pour effet de réunir les surfaces bâties les proches, de combler les concavités des contours et de rattacher les aires les unes aux autres par comblement des vides interstitiels.

  • Détail de la démarche à partir d'un exemple
  1. Image initiale : bâti observé à une date donnée
  2. Extension du bâti correspondant à une fermeture de taille 6 de l’image initiale
  3. Détermination du périmètre constructible
  4. Extension du bâti après suppression des points tombant dans le périmètre inconstructible
  5. Squelette de la fermeture de taille 6 matérialisant la ligne directrice de l’extension du bâti
  • Application de la modélisation à la diffusion du bâti au cours de la période 1977-1990 dans la zone littorale languedocienne et à la détection des directions suivies par l'urbanisation
    16 pas de simulation permettent d’atteindre le niveau des surfaces bâties en 1990, ce qui correspond à un taux de croissance moyen de 0,05 par pas de fermeture contre 0,06 pour le taux de croissance annuel moyen observé durant la période 1977-1990.
  • Animation : squelette des aires bâties obtenu à chaque pas de simulation (période 1977-1990)
  • Validation
    La validation du modèle repose sur diverses formes de comparaison de l’urbanisation simulée avec l’urbanisation observée. Dans toute modélisation spatiale, la variabilité locale du phénomène modélisé est forte, et ce d’autant plus que l’échelle est grande. Au niveau du pixel, des écarts importants peuvent exister entre les localisations bâties observées et les localisations estimées par le modèle.

 

Deux manières complémentaires de valider le modèle spatio-morphologique sont proposées.

 1) La comparaison de l'extension du bâti observée et simulée.

 Cette comparaison peut d'abord s'effectuer visuellement. Les surfaces bâties estimées par le modèle (A) sont intersectées avec les surfaces observées (B). Le résultat permet de repérer l’emplacement des zones de concordance.

Comparaison des bâtis simulé et observé

Le degré de concordance des deux squelettes peut être aussi visualisé et mesuré au moyen de la distance de Haussdorff (Voiron-Canicio, 1995). Cette mesure des écarts entre les deux tracés correspond à la distance à combler pour que les deux squelettes se recouvrent totalement.

 

Comparaison des 2 squelettes

 

Remarques :

La diffusion par connexion entre les petits éléments du bâti est surestimée par le modèle. Inversement, la croissance auréolaire des gros bourgs est sous-estimée. L'axe central Montpellier-Carnon et la bande littorale ont connu une croissance du bâti plus forte que le reste du sous-ensemble littoral. Cette différenciation n'est pas prise en compte par le modèle.

 

2) Le calcul du coefficient de similarité "simil"

           simil(A,B) = aire intersection (A,B) / aire union (A,B)

 

on a d(A,B) = aire union (A,B) - aire intersection (A,B) = [1- simil(A,B)] x aire union (A,B).

 

Simil est relié à la distance d, mais à sa différence, il ne dépend pas de la taille des images. A noter que simil(A,B) est différent de simil(A c,B c) . Enfin il vaut 0 quand la distance d est maximum, et 1 quand elle est nulle (deux objets identiques sont parfaitement similaires, et ils ont une distance nulle).

Le coefficient simil est de 0,5238

 

3) Deuxième simulation : modification du processus de diffusion

Pour rendre compte de la croissance auréolaire observée dans les gros bourgs et de la différenciation spatiale entre la bande côtière, l'axe central et les gros bourgs, d'un côté, et le reste du sous-ensemble, de l'autre, le processus de diffusion spatio-morphologique s'effectue désormais en 2 temps :

  • Dilatation géodésique de taille 2 de la bande côtière, de l'axe central et des gros bourgs. Ces derniers sont discriminés par une ouverture de taille 1 de l'image initiale.
  • Union du dilaté obtenu avec le reste du bâti.
  • Fermetures géodésiques jusqu'à ce que soit atteinte la surface observée en 1990.


Le coefficient simil est de 0,624

 

Comparaison des bâtis simulé et observé

 

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